23 novembre 2006

Longue distance

DRRING! DRRRING!

- Oui allo?
- ...
À l'autre bout de la ligne, on n'entend que la respiration difficile et on ne peut que deviner les larmes qui coulent silentieusement, la gorge trop serrée par l'émotion pour laisser échapper le moindre son.
- Oh, non... Poussinette, qu'est-ce qui se passe?

Le son d'une voix qui s'inquiète, c'est tout ce qu'il faut pour que la cascade de sanglots déferle en gros bouillon. On ne peut que laisser couler et attendre l'accalmie, en répétant :
- Respire, respire ma belle, tout doux.

Et puis, entre deux inspirations laborieuses, avoué tout bas comme un secret qu'on ne voudrait pas donner mais qui pèse trop lourd pour soi :
- ...c'est fini ...
- ...Pauvre puce, je suis désolée... Qu'est-ce qui s'est passé?

Et les mots finissent toujours par trouver leur chemin au travers des gorges serrées. Les coups de sangs se hurlent, le désespoir se pleure, l'incompréhension se questionne, se fouille, s'éclaircit. L'histoire se raconte, prends son sens, devient tangible.
Et l'autre voix encourage, se taît, s'insurge, calme.
- Cocotte, peux-tu m'attendre une couple d'heures?
- Pourquoi? Tu étais occupée quand j'ai appelé? Je m'excuse, t'aurais du le dire!
- Non, non, pas du tout. C'est juste que j'embarque dans mon auto là. Je m'en viens.

**********
Il y a des moments où la distance paraît vraiment longue, parce qu'elle empêche tant de choses. Elle rends les silences embarassés alors qu'ils se voudraient respectueux, si seulement on pouvait les accompagner d'un regard qui comprends. Elle provoque des mots inutile et inadéquats là où une embrassade aurait bien mieux fait les choses. Elle coupe le contact dans les moments les plus durs, quand il n'y a rien à dire et aucune façon de le faire. Elle fait disparaître le réconfort, le remplace par de la simple consolation. Elle absorbe le language non-dit à en confondre la lucidité avec le déni.
Et aussi, elle empêche de voir le demi sourire aux yeux pleins d'eau qui prouverait sans nul doute qu'on va s'en sortir malgré tout.


Il y a des jours, maudit que je me trouve loin.

2 commentaires:

Chris a dit...

oh boy! je ne suis pas aussi loin de chez moi que toi, mais je te comprends très bien!

Dodinette a dit...

"Elle fait disparaître le réconfort, le remplace par de la simple consolation."

il y a des jours où, maudit, que je trouve que les autres écrivent tellement bien...

la distance a une chose de bon : dans ce genre de circonstances, rien n'est plus réconfortant (pour le coup c'est vraiment le cas) qu'une lettre. une belle lettre à la plume, pour laquelle on prend son temps et dans laquelle on se met en entier.