11 février 2008

En beau canon (à neige)

J'avais envie d'un titre pas mal plus scandaleux que ça aujourd'hui. Genre "Touristes au Québec en hiver - Soyez certain de votre assurance-vie" ou "Montréal et ses touristes : à l'hiver, à la mort". Sauf que c'est pas juste Montréal. C'est l'Ontario, l'Alberta et la Colombie Britannique aussi. Au moins, au Québec, les régions sont un peu plus au fait des nécessités de l'hiver.
De toute façon, le fin mot de l'histoire étant que je suis en beau maudit, c'est ça mon titre... (et une fois que je serai dépompée, ça aura un peu moins l'air hystérique.)

On s'en va au Québec mardi en huit. Je n'y étais pas pour les fêtes mais maintenant les bedaines poussent de partout, les thèses de doctorat se terminent, les frères ont trente ans, les grands-mamans chambranlent et les oncles se font opérer ; il me semble plus que temps de descendre. (Plus, une opportunité dont on reparlera peut-être et qui fait qu'on ne paye pas nos billets d'avion, encore une fois!)

C'est la deuxième fois depuis le début de l'exil que je descends au Québec en hiver sans avoir ma voiture à moi sur laquelle compter - et je la regrette donc en ce moment! La première fois, aux fêtes de 2006, je me suis faite avoir comme une débutante. J'arrivais d'un vol de 10 heures qui, malgré qu'il soit en première classe, m'avait épuisé et je n'avais pas l'énergie de m'obstiner. J'ai payé pour ma paresse le premier janvier, quand je me suis retrouvée coincée à Québec city sans pouvoir ni rejoindre Trois-Rivières pour le party de famille, ni descendre chez papa-maman à une heure et quart de Québec, pour cause de pluie verglaçante sur pneus d'été.

Ben si.
Parce que qu'à Montréal, quand vous atterrissez à l'aéroport en plein milieu de l'hiver, même pendant un hiver où la ville a déjà reçu plus de 124 cm de neige en quelques mois (cette année), ou pendant un hiver si peu hivernal qu'à chaque fois que ça se couvre c'est pour neiger une autre couche d'eau sur les patinoires qui servent de routes (l'année dernière), les voitures qui vous sont offertes en location sont toutes -toutes!- sur les 4 saisons. Comme me le disais mon si charmant employé de Hertz il n'y a pas une heure, "Il n'y en a pas de pneus d'hiver de disponible à Montréal, Madame!" Pardon? Montréal, c'est bien toujours au Québec? Le Québec dans le Canada là? Le Canada au NORD de L'Amérique du Nord?
Ben si.

En 2006, nous étions avec une autre compagnie (National? Alamo? M'en souviens plus) et j'ai perdu une journée complète et ma patience légendaire au téléphone, en interurbain avec la fille de Montréal, scrapant ma journée et la sienne en passant (Bonne Année!) pour finalement obtenir la permission d'aller à la franchise de l'aéroport de Québec pour échanger leur dangereux bazou contre un PT Cruiser sur pneus d'hiver. Beau patinage artistique, juste assez pour éviter la plainte - quand même pas assez pour que je refasse affaire avec eux un jour.

Cette fois-ci, j'en ai pour deux jours de location. Deux misérables petites journées pour descendre chez mes parents et revenir. Qu'elles sont les chances que la météo ne soit pas de notre bord, franchement?
Ben je m'en fous. Je vais payer avant de partir (et mes nerfs payent le prix fort en ce moment) mais la voiture avec laquelle je m'éloigne de Montréal va avoir des pneus qui vont être capable de me ramener le sur-lendemain. "Jamais plus!", coassai-je, et cela me rendit presque folle.

Nous sommes chez Hertz parce que chéri est number one member et que j'ai naïvement cru que ça aiderait les choses. C'était sans compter que Montréal est une île, donc tout le monde connaît les procédés douteux-mais-économiques de la concurrence et ne voit pas le problème à faire de même.
Kitty a d'abord vérifié partout sur le site internet pour trouver l'option "pneus d'hiver". Croyant l'avoir trouvé sous l'option "pour le ski", envoie d'un petit mail rapide pour savoir si on peut avoir les pneus sans avoir les barres sur le toit. Réponses ce matin: "Unfortunately we only offer all weather tyres in Montreal." Et après vérification du site(parce que je suis rapide sur le bouton de fausse représentation dans ces cas-là), ils disent bien "includes all weather or winter tires". Les c***s.

Donc je les ai appelés, avec mon plus beau sourire crispé en essayant de garder mon ton de voix sous le seuil de l'hystérie. Je n'ai pas réussi. Je pouvais entendre dans les réponses de l'employé - que j'ai probablement réveillé; ayant mal calculé mon décalage horaire, il était 6h30 au Québec - qu'il trouvait qu'il avait affaire à une vielle bigote bouchée qui ne voulait pas comprendre qu'il ne pouvait rien faire pour moi.

J'accepte le jugement. De mon côté, j'avais l'impression de parler à un ordinateur à programme unique: "Je comprends", "Je ne peux rien faire, on le sais que c'est dangereux, on a eu plusieurs plaintes, mais personne ne peut rien y faire" *C'est la faute au Saint-Esprit!*, "Je vais vous expliquer (qu'il n'y en a pas de tires d'hiver à Montréal Madame)". Auquel je réponds, désespérée, "Je ne veux pas une explication, je veux une solution!" - auquel il répond "je comprends". Rendu là, j'arrache le téléphone de la prise et je le balance dans le mur. Désolée Patrick, je préfère être une bigote logique qu'un incapable à penser par lui-même. La conversation s'est terminée sur un adorable "Rappelez à 9h et demandez à parler à la gérante, elle va vous expliquer." Arrrgh!

Edité plus tard -Je n'ai pas rappelé à 9h. J'ai appelé Longueuil à la place. Un vrai, adorable Stéphane de bonne humeur m'a promis d'un murmure doux à mon oreille qu'il aurait une voiture pour moi à 18h - avec des pneus d'hiver. Entre l'aéroport et Longueuil? Ce que l'aéroport m'aura loué. Ils gardent ma réservation comme elle est et moi j'obtiens mon fix ailleurs...
Ouaip, Stéphane et moi, on joue dans le dos de Patrick - sans frais - et j'ai même pas de remords.


La version courte de cette longue histoire: les pneus d'hiver sont aux frais de chaque agence. En région, la demande est moins touristique; elle vient plutôt de compagnies ou de particuliers qui savent et exigent les pneus d'hiver - et qui ramènent la voiture le plus souvent à l'endroit où ils ont loués - alors les franchises de locations en mettent sur leur voitures. À Montréal, les voitures voyagent souvent d'une franchise à l'autre, personne ne veut payer pour des pneus qu'ils ne reverront jamais, alors ils supposent que les touristes vont rester en ville (même pour faire du ski) et réussissent à dormir tranquille - plus, en cas d'accident, ce n'est pas eux qui paient mais la compagnie d'assurance du conducteur. Une conversation intéressante même si en anglais ici.

Pour ceux que j'ai effrayé et qui n'oseront plus jamais, par ma faute, réaliser leur rêve de toujours de de visiter le Québec en traîneaux à chiens, sachez qu'il y a une nouvelle loi qui entrera en application le 15 novembre prochain et qui rendra illégale l'utilisation de pneus mal-adaptés en période hivernale - même pour les compagnies de location!

04 février 2008

Magasiner sans discrimination

Kitty et moi, nous avons de nouveaux boss.

Nous en sommes cré cré heureux comme tous bons rebelles à l'autorité que nous sommes. Des rebelles de bas étages qui sauraient mieux que n'importe quel boss comment faire rouler les choses rondement, mais qui refusent d'être calife à la place du calife parce que le boulot de calife est ennuyant. C'est exactement nous.

Toujours est-il que la toute première décision des nouveaux califes, ce fut d'instaurer l'uniforme obligatoire dans toutes les écoles secondaires de la région au travail - et ils n'ont même pas eu la décence de mentionner une politique de casual Friday hein, c'est tout le temps la jupe à pli et la cravate de soie*. Tout le temps!
*Je voudrais bien les voir, Kitty est un digne produit de la mentalité Anglaise, là où les jupes et les cravates, c'est de la discrimination sessuelle!

Quand même. Il n'en reste que maintenant, dans ma lointaine Hongrie sur le bord de mon lac, là où les clients ne peuvent pas venir sans s'être annoncés parce que c'est tellement creux qu'ils vont se perdre sur le chemin et ne jamais être retrouvés si nous n'allons pas les chercher nous même, là où il fait 40°C de trop pour porter un veston en plein été, là où l'air climatisé ne fonctionne pas parce que l'air de dehors est encore assez pur pour être qualifié de meilleur que l'air en canne alors les fenêtres s'ouvrent hiver comme été, là où la moitié de mes journées je les passent avec un masque dans la face, des gants en latex et des couvre-bottes en plastique bleu, je dois porter le costume pour aller travailler. Et quand je dis costume, c'est bien parce que j'ai l'impression d'avoir à me costumer.

Alors ce week-end, Kitty et moi sommes allés magasiner à Budapest pour lui acheter des pantalons propres et un change de chemise au moins.

J'en suis revenue avec une jupe (parce que ce n'est pas de la discrimination si c'est moi qui décide de la porter), un pantalon anthracite et un complet jupe/pantalon dont la veste était trop petite, snif, c'était super joli, je la voulaaaais, je la désiiire encore! (Oui, je sais, je devrais écrire des chansons, je suis douée).

Quand j'ai eu dépensé tous mes sous, j'ai finalement accepté de concentrer mes efforts sur Kitty au lieu de partir vers les vitrines pour filles t'as vu chéri la robe en feutrine elle est super jolie, tu veux bien je vais aller l'essayer le look 60's c'est génial j'adore et en plus elle est à ma taille, regarde avec des bottes au genoux je suis Brigitte du temps où il était bon de l'être, non? (Il paraît que non en fait. Kitty, les robes en feutrine à mi-cuisse, il n'aime pas trop...ou bien il n'a juste jamais connu Brigitte)

Les chemises de mon homme furent un jeu d'enfant à trouver. En fait, les chemises, Kitty aime bien et même qu'il se fait une joie d'acheter des cravates si elles ne sont pas roses - sauf qu'il refuse de les porter ensuite et c'est moi qui s'y colle (parce que la cravate sur une fille, ce n'est pas de la discrimination non plus).

Les pantalons demandèrent très peu d'effort de la part de l'intéressé. Il faut aller chez Kristóf Férfi Divat au moins une fois dans sa vie pour voir une horde de femme se jeter sur un pauvre homme qui n'a rien demandé et, sans rien lui dire, lui ajuster une paire de pantalons qu'il aurait jugé trop grands d'emblée, zip-zap, ça vous fera 120$ et ça sera prêts samedi prochain. Si seulement il y avait la même chose pour femmes... avec un tailleur jeune et dynamique à mes genoux à faire le bas de pantalons... pis l'entrejambe.. ou la fente de la jupe, pourquoi pas...

Hein! Je m'égare!
Comment elles arrivent à faire ça, les petites madames? Ben en me parlant à moi pardi, puisque Kit comprend Csák Angolul (juste en anglais) alors que moi, Csák Kicsit Magyarul (juste un peu en hongrois) ce qui est définitivement mieux.

Il faut savoir qu'en entrant dans le magasin, c'est absolument inutile de vous diriger vers les vêtements. Il faut aller vers les vendeuses qui vous attendent épingles en bouches et galon autour du coup. Elles ont peut-être l'air peu engageantes, mais c'est mieux d'aller vers elles de vous-même que de vous diriger ailleurs et d'en avoir une qui vous apparaît à deux pouces du visage alors que vous alliez toucher impunément le tissus d'un pantalon qui n'a pas été sélectionné pour vous, malheureux, ce n'est pas permis!

Vous avez le droit de mentionner ce que vous chercher, quel genre de tissus et quelle couleur mais passé ça, ce n'est plus votre domaine. J'ai rarement aussi peu ressentit les manquements de mon hongrois parlé; elles étaient contente de m'entendre dire tizenötediken et de décider du reste entre elles.

Inutile pour moi de regarder autour pendant que Kitty essaye; même si je trouve un beau pantalon gris charcoal dans la taille entre ce qu'il porte habituellement et celle que la vendeuse a décidé qu'il était en le regardant arriver, le pantalon sera derechef décrété trop petit et replacé sur l'étalage par une autre vendeuse aux aguets. Je ne suis utile que quand la vendeuse vient me demander si je veux que Kitty ait aussi un pantalon bleu en plus du noir qu'il essaie en ce moment (parceque lui, hein, passé csák angolul, il n'avait plus un mot à dire). C'est quel genre de discrimination, ça?